Le point de vue de l’étranger…

Ce monde est bien déconcertant pour celui qui le regarde avec les yeux de l’étranger…

Moi qui ne suis pas d’ici, bien que vivant l’exil en ce pays depuis déjà fort longtemps, je n’arrive pas à comprendre certaines moeurs en vigueur sur cette terre, pourtant par ailleurs si proche de la mienne.

Ainsi de la misère.
La misère est une chose qui n’existe pas au Pays de Mon-Icarie, d’où je suis.
La pauvreté, oui, mais pas la misère.
Il y a des riches et il y a des pauvres, au Pays de Mon-Icarie, mais là-bas, le pauvre n’envie pas le riche, et le riche respecte le pauvre.
Le pauvre est pauvre parce qu’il a choisi d’être pauvre, et sa pauvreté, bien souvent est reconnue comme le signe extérieur d’une richesse intérieure, admirée, parfois même enviée par celui qui a choisi le confort, voire l’opulence que lui confère la possession de biens matériels, acquis toujours par le mérite d’un travail acharné.

Le pauvre, au Pays de Mon-Icarie, sait qu’il ne tient qu’à lui de s’enrichir, ainsi, il n’envie pas, et respecte le riche, dont la parole cependant, ne vaut pas plus cher que la sienne ; car ce que vous entendez ici par « la richesse » ne vient pas là-bas alourdir le poids des mots : si la possession de biens matériels octroie une certaine aisance, elle ne confère pas pour autant, comme ici, la sagesse…

L’enrichissement d’un homme, au Pays de Mon-Icarie, n’est jamais la cause de l’appauvrissement d’un autre homme. Au contraire. Car il est un seuil au delà duquel les richesses produites par un homme ne lui appartiennent plus en propre, mais viennent accroître le patrimoine de la communauté dans son ensemble. Un tel homme est alors regardé comme un bienfaiteur par ses pairs, et il n’est ainsi point de richesse injurieuse.

L’étranger qui, venant du Pays de Mon-Icarie, pose son regard sur cette terre ne comprend pas : il se demande comment il se peut qu’alors que se créent ici de plus en plus de richesses, des pans entiers de la population, de plus en plus nombreux, sombrent dans une pauvreté qu’ils n’ont pas choisie, une pauvreté indigne, qui a pour nom misère, et qui va jusqu’à priver l’homme qui y est jeté, de ses droits les plus élémentaires : celui de se nourrir et de se vêtir, et celui d’avoir un toit pour abriter ses nuits.

Au Pays de Mon-Icarie, chaque homme à droit à un petit lopin de terre, qui sait, par le fruit de son labeur, assurer à chacun la satisfaction de ces besoins élémentaires…

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