Monsieur Le Président de la République,
Nous pouvons constater sur un grand nombre de vidéos postées sur l’Internet relatant les manifestations que connaît notre pays depuis plusieurs semaines, certaines actions de la police qui semblent franchement sortir du cadre de la mission d’ordre public qu’une population est en droit d’attendre de ses gardiens de la paix. Il est possible de voir sur certaines, de pacifiques citoyens se faire matraquer par des agents armés pour le simple fait qu’ils sont en train de filmer, autrement dit de témoigner ; témoigner deviendrait il un délit que la police aurait le droit de sanctionner directement par un acte violent ?
Sur d’autres, ce sont des personnes déjà âgées et d’allures parfaitement respectables qui se font violemment agresser par ces mêmes agents alors qu’elles ne représentent de toute évidence pas le moindre danger pour ces hommes armés censés les protéger…
Est-ce là l’image de l’Ordre Républicain que vous défendez, que vous cautionnez, dont vous êtes le premier représentant et par là même le premier responsable ?
De tels agissements sont-ils dignes de représentants d’une force censée être là pour mettre à l’abri des actes des délinquants la population dont vous avez la charge ?
De quel Ordre ces policiers sont ils les représentants ?
Sur ces images, qui sont les agresseurs ?
Bien sur, nous n’en pouvons pas douter, ces personnes affublées de gilets jaunes, visages découverts et déjà âgés sont les chefs d’une dangereuse bande de délinquants qui mettent en péril la sécurité de ces fragiles gardiens de la paix…
Votre silence face à de tels actes, Monsieur le Président de la République, vous désigne comme pire que simple complice : comme le responsable en premier lieu de tels agissements, et vous ne sauriez échapper soyez en sûr, vous et vos ministres, au devoir un jour d’en rendre compte.
Nous comprenons la fatigue des policiers soumis à une charge de travail et à une pression telle qu’ils sont poussés parfois à des débordements desquels ils ne seraient peut-être pas la proie dans des conditions normales d’exercice.
Mais cela ne peut excuser une telle dépravante anarchie.
Et de cela aussi vous êtes responsable, Monsieur le Président de la République, vous, votre gouvernement et les gouvernements qui vous ont précédé, qui n’ont eu de cesse que de détruire le socle d’une société fraternelle basée sur la mutualisation des richesses et des moyens pour en faire un jeu sordide de monopoly grandeur nature, dans lequel l’humain n’est plus qu’un facteur négligeable s’il peut être remplacé à bon compte dans la création d’une richesse illusoire au service de quelques intérêts privés, qui répandent et cultivent la misère dans le monde !
Et puisque enfin vous daignez me donner la parole, Monsieur Le Président de la République, à travers le débat national que vous avez bien voulu instituer, voici ma contribution.
Si vous prenez réellement acte de l’ampleur de la crise et de l’urgence en laquelle se trouve le monde, vous comprendrez aisément que les vielles recettes de l’économie capitaliste que vous défendez ne sont pas à même de sauver ce qui pourrait l’être encore.
Dans la vision que je porte, l’Etat étant à la fois le cadre et l’expression de la citoyenneté, chaque ressortissant est un fonctionnaire au sein de cet Etat, ce qui signifie qu’il y détient une fonction en adéquation avec ses compétences et sa force de travail, créant ainsi de la plus value et lui offrant les conditions de base à une existence digne.
L’impôt est déterminé par le nombre d’heures obligatoires de participation à l’édification d’une richesse nationale (le trésor public) défini par un contrat social réactualisé par le vote à intervalles réguliers pour en fixer les objectifs, et égal pour chacun en fonction de son appartenance à une classe d’âge.
Considérant la force de travail d’une Nation toute entière, cette imposition en temps devrait laisser à chacun, la base de son existence en outre étant assurée, le loisir d’organiser le reste de sa vie comme il l’entend selon ses aspirations personnelles.
Libre à chacun de se contenter des conditions basiques d’existence que lui procure sa participation obligatoire à la richesse collective, de s’enrichir personnellement par un commerce redevenu libre entre les individus, ou de s’engager plus profondément dans l’œuvre publique par une contribution supplémentaire compensée par un système de privilèges octroyés en fonction de la charge.
Un tel système impose des comptabilités différentes et sans porosité entre la sphère publique et la sphère privée, celle-ci étant devenue totalement indépendante de celle-là, l’Etat n’ayant alors plus droit de regard sur la richesse individuelle pourvu que celle-ci soit acquise en toute légitimité dans la légalité, cette dernière cependant ne pouvant servir de dérogation à la contribution obligatoire définie par le contrat social. Cela implique donc des monnaies d’échanges différentes.
Dans un tel système, après redéfinition de ce qui est privatisable et de ce qui ne l’est pas, l’exploitation ou la confiscation indue de la force de travail, qui est à l’origine d’une misère grandissante et qui fait le lit de la révolte devient impossible, chacun étant assuré par sa participation à l’œuvre collective des conditions dignes de son existence.
L’action publique n’est pas engagée par un impôt financier, mais par une contribution équitable de chaque citoyen basée sur le temps, la compétence et la force de travail.
De ces trois facteurs, à eux seuls nécessaires et suffisants pour la création d’une richesse publique, seul le temps représente une valeur égale pour chacun : nous sommes tous égaux face à lui, et l’équité exigerait donc ici l’égalité en ce qui concerne la juste participation de chacun à l’édification de l’œuvre publique par l’impôt.
La richesse ne se crée pas grâce à un investissement monétaire : cela n’est qu’une grossière supercherie édifiée par les intérêts privés qui prétendent s’enrichir à bon compte par la force de travail détournée.
La richesse se crée uniquement par la transformation de la matière, qui ne requiert pour cela, outre la matière initiale, que le temps, la compétence et la force de travail.
Il serait vain de prétendre endiguer la crise en laquelle se trouve le monde sans s’attaquer directement à la cause première qui la provoque ; cette cause, c’est sans aucun doute possible, le débordement des intérêts privés sur l’intérêt collectif.
Il ne s’agit pas de nier le droit à l’intérêt privé : il s’agit d’en restituer le juste cadre.
L’Etat ne saurait sans détournement être une entité qui s’oppose à la population qui le compose : il devrait être dans l’acception même de son nom, la résultante de toutes les forces individuelles de ses ressortissants. Son unique objet est d’offrir, par la contribution de chacun et le juste partage de la richesse ainsi créée, le meilleur cadre de vie possible dans le périmètre de son étendue.
L’Etat n’a besoin pour exister, d’aucun budget prévisionnel, car il est riche à l’avance de l’immense force de travail et de transformation que représente même une infime partie du temps et de la compétence de chacun et de l’ensemble de ses ressortissants. Le seul calcul à effectuer est celui du nombre d’heures que chacun devrait consacrer à cette entité pour créer le cadre de vie qui permettrait l’accès pour tous à des conditions d’existence dignes et équilibrées entre le temps dédié à la collectivité et celui dédié à l’intérêt privé.
Le service public ne peut être comparé à l’entreprise privée, car les objectifs de l’un ne peuvent être confondus avec les objectifs de l’autre.
Le service public a pour double mission d’offrir à chaque ressortissant une raison sociale en lui permettant de participer par sa juste contribution en temps, compétence et force de travail à la création d’une richesse collective, et de répartir équitablement la richesse ainsi créée.
L’entreprise privée a quant à elle, comme son nom l’indique, pour objectif de constituer un capital en servant des intérêts individuels qui ne vont pas forcément dans le sens de l’intérêt collectif.
C’est pourquoi il est parfaitement fallacieux de vouloir confier des missions de service public à des entreprises privées.
Restaurer un véritable service public sur lequel l’Etat reprendrait totalement la main comme il se devrait, ne saurait se faire à l’heure actuelle sans remettre en cause la légitimité de la privatisation de certaines ressources de la planète et du territoire.
Sans entrer ici dans un développement qui à lui seul demanderait l’organisation d’un grand débat, il semblerait qu’un examen même assez superficiel permettrait de mettre à jour l’appropriation abusive de certaines de ces ressources.
Vous affirmez, Monsieur Le Président de La République, que la France n’est pas un pays comme les autres…
A quel titre, n’est il pas un pays comme les autres ?
Ne s’est il pas lancé comme les autres dans la course folle et délétère que représente une économie basée sur les seules notions de marché mondial et de concurrence ?
Les fleurons même de notre économie nationale dont vous vous faites volontiers le premier représentant à l’étranger ne sont ils pas des industries aveugles et létales qui sèment dans le monde la misère, qui prospèrent et fleurissent sur cette misère, qui engagent, si tant est que nous leur offrions seulement un espoir de survie, les générations à venir pour des siècles voire des millénaires, en leur laissant en héritage des technologies que nous utilisons allègrement sans en maîtriser ni les tenants ni les aboutissants ?
Nous n’avons que faire, Monsieur Le Président de La République, des investisseurs étrangers qui ne sont là que pour piller notre patrimoine national !
Vous n’avez pas été élu pour être le représentant des grands groupes privés qui ne paient pas l’impôt, ou si peu, et qui affament les populations en s’enrichissant outrageusement par la confiscation du travail et le détournement des richesses !
Vous avez été élu pour porter la Voix de La France !
Alors écoutez la enfin La France, qui gémit et qui déjà se lève !
La France vous dit qu’elle ne veut plus de la misère !
Et puisque tel est votre rôle, Monsieur Le Président de La République, allez dire au reste du monde, et La France alors ne sera plus un pays comme les autres, que La France ne réclame pas seulement plus de justice et d’équité : Elle désire La Justice et L’Equité !
L’Etat ne saurait être l’ennemi du citoyen tant que celui-ci évolue en toute légitimité dans le cadre d’une légalité elle-même issue d’une véritable concertation démocratique au sein de laquelle il devrait être appelé à donner son avis et consentement à chacune des étapes de sa constitution.
La représentation élective ne devrait être là que pour simplifier le débat en portant la parole des citoyens de manière audible afin par exemple de proposer une constitution et des textes de loi, mais en aucun cas l’élu ne devrait avoir un quelconque pouvoir décisionnel sans que celui-ci ne puisse être directement et immédiatement remis en cause par ceux-là mêmes qui lui ont confié la mission de porter leur parole.
Une véritable démocratie exige que chacun concerné par une loi puisse prendre part à son établissement et à son vote. Toute autre forme n’est qu’un ersatz destiné à endormir les consciences dans le but de servir des intérêts privés.
Cela suppose une éducation et une implication populaires qui sont à l’antipode des politiques gouvernementales qui œuvrent non pas dans le sens du bien public mais dans celui des intérêts privés.
Pourquoi donc le Référendum d’Initiative Citoyenne vous hérisse-t-il donc autant, Monsieur le Premier Ministre ?
N’est-il pas au contraire la base et le garant d’une réelle démocratie ?
Mais quand bien même, puissants du monde, vous abdiqueriez votre pouvoir usurpé au profit des détenteurs véritables de la science, que pourrions nous raisonnablement espérer sauver de ce monde mené à la faillite par des siècles d’obscurantisme ?
Vous nous parlez de « transition écologique » comme si nous avions encore du temps devant nous, comme si nous pouvions espérer continuer de concilier la sauvegarde de l’humanité et le vieux modèle sur lequel vous avez bâti votre prospérité en instituant un mode aberrant de consommation au détriment de vos frères, des autres espèces, de la planète qui nous héberge…
Ce vieux modèle que vous avez érigé comme un temple est déjà tombé, et si vous n’en avez pas encore conscience, c’est sur ses ruines qu’à présent vous évoluez.
Vous nous demandez quel est selon nous le problème le plus prégnant : la pollution des eaux, la pollution de l’air, les bouleversements climatiques (dont contrairement aux autres problèmes on ne peut affirmer qu’ils soient uniquement l’œuvre de l’homme). Vous ne parlez même pas de la démographie galopante qui devient pourtant un des véritables sujets dont il faudrait s’inquiéter, car nous sommes aussi assidus à nous multiplier que nous le sommes à supprimer les autres espèces…
Vous nous demandez quel est le problème le plus prégnant afin de lui distiller un remède homéopathique à l’heure où vous prétendez priver les populations du recours à une telle médecine… Or, si nous sommes adeptes des traitements homéopathiques, nous savons bien qu’ils peuvent opérer en phase de développement de la maladie, mais qu’ils deviennent bien peu efficaces dans sa phase terminale…
En vérité, il n’est pas un problème qui soit plus urgent à régler que l’autre.
Il est tout simplement urgent de sauver ce qui peut l’être de l’incendie : non pas l’avoir, mais l’être.
Les civilisations, tout comme les individus ont une naissance, un développement, une mort…
Nous savons, lorsque nous avons eu la chance d’atteindre un certain âge, que nous allons inéluctablement vers notre propre mort. Faut-il être un grand sage pour prédire qu’une civilisation qui s’est étendue sur toute la surface de la planète qui l’accueille, sans aucun égard pour celle-ci, consommant sans vergogne plus qu’elle ne saurait produire tout en laissant derrière elle un amas de déchets indestructibles, et cela sans la moindre volonté de freiner son accroissement, faut il être un grand clerc pour prédire qu’une telle civilisation touche à sa fin ?
La seule chose qui nous soit à présent permise d’espérer n’est-elle pas que l’humanité toute entière ne soit ensevelie et périsse misérablement dans l’inéluctable chaos, mais qu’au moins soit sauvée la somme des connaissances si chèrement acquises au fil des millénaires par la chaîne ininterrompue des générations, des sacrifices et des expériences à travers son éblouissante histoire, en construisant s’il en est encore temps, sur les ruines fumantes du temple de la consommation, les fondations du Temple de la Connaissance ?